Mission II : Rituel.

Après qu'Ariel se soit présenté à son tour à Daël et que la conversation prit plus ou moins naturellement fin, Arawn suivit la foule mâle dans le temple.

Il se déshabilla sans gêne, et se cacher même avec ses mains ne lui était pas venu à l'esprit une seule seconde. Il n'avait rencontré que peu de démon embarrassés par leur propre nudité ou celle de leurs camarades. Cependant, la présence des prêtresses aurait pu attiser quelque sursaut de pudeur chez lui mais ce ne fut pas le cas. Peut-être avait-il trop l'habitude de se balader nu chez lui et avec ses différents partenaires (d'un soir ou de plusieurs) pour se sentir rougir. De plus, l'attitude plutôt stoïque et très loin d'être lubrique des dames présentes le ramenait d'autant plus à l'aspect solennel de la situation.

Il pénétra dans l'eau  en marchant lentement. Lorsque l'eau lui arriva à la taille, il prit une profonde inspiration et se laissa couler jusqu'à être complètement immergé. Il resta ainsi deux secondes (l'apnée c'était pas son truc) avant de revenir à la surface. Les hommes se tenaient en petits groupes disparates dans le bassin, et le démon décida de rejoindre celui d'Ariel qui discutait avec une tête qui lui sembla familière.

Il avait croisé Itachi par l'intermédiaire de Katarina, mais ils ne s'étaient jamais véritablement parlé. Ou même vraiment rencontré.

« Pour une question d'équité, elles auraient pu se déshabiller elles aussi... »  souffla Itachi d'un ton amusé.

Arawn jeta un oeil aux prêtresses qui surveillaient le bassin d'un air plus ou moins intéressé.

" Je suis pas sûr qu'elles soient du même avis. " dit-il placidement.

"Et puis si elles ne participent pas au rituel, pourquoi se mouiller hein ?" renchérit Ariel avec son indécrottable sourire en coin. "Enfin mon cher Itachi, je ne te savais pas adepte des orgies en piscine."

Arawn roula des yeux, non sans un certain amusement. Bien qu'ayant vécu longtemps au pays des démons, l'ange se permettait un paquet de blasphème que même un pas croyant comme lui n'oserait jamais prononcer ailleurs qu'à Emeraudia.

Ses ablutions terminées, le démon sortir de l'eau et se sécha avant d'enfiler une tunique et un pantalon d'un blanc éclatant. Le tissu était léger et doux, il se demanda s'il pourrait le ramener chez lui ou si les prêtresses se montreraient radines.

Arawn se dirigea vers la salle que celles-ci lui indiquèrent et y retrouve les membres féminines du groupe.

Même s'il n'était pas du type dévot, la splendeur du lieu tirait en lui plusieurs ficelles mis en place par son éducation au Pays de l'Eté. Sans la vénérer, Arawn respectait la Déesse, il n'était pas du genre ingrat.

Après quelques minutes un peu génantes où la reine restait silencieuse et immobile, elle se décida à s'immerger dans la fontaine et Lantys leur expliqua enfin le fin mot de l'histoire.

Arawn se mordit l'intérieur des joues pour tenter d'empêcher son sourire de se faire trop visible lorsque l'empereur révéla que les informations qu'il avait récupéré dans l'antre des rebelles avaient été utiles. C'était pas tous les jours qu'Arawn entendait son nom dans la bouche d'une personne si haut placée de manière positive. Son petit plaisir fut cependant de courte durée.

Lantys quitta la salle en compagnie des autres prêtresses sous l'ordre de Tamia. Arawn obéit à l'injonction de celle-ci et alla se placer contre le mur où il se retrouva entre Cordélia Waldorf et un des incubes.

L'annonce que l'artefact volé était en réalité le sceptre de la Déesse lui fit l'effet d'un coup de massue. Il connaissait bien son histoire, rabâchée à l'école pendant ses jeunes années. Du coin de l'oeil, il vit le visage fermé d'Ariel et sur qu'il pensait la même chose que lui : comment diable les anges avaient réussi à pénétrer le temple et réussir leur larcin ?

Le début du rituel interrompit ses réflexions. Son corps sembla être pris de fièvre, puis ce fut comme si toute cette chaleur était drainée via son sternum. Lorsque la boule lumineuse apparut devant lui, manifestation de son pouvoir, Arawn fut pris de violent frissons et ses dents claquèrent frénétiquement, la perte temporaire de son pouvoir lui laissant un froid intense dans les veines et dans les os.
Malgré tout, il parvint à rester debout jusqu'au bout du rituel.

Dès que la reine leur en donna l'autorisation, Arawn lâcha les mains de ses collègues et se frictionna les bras. Ses dents claquaient si fort qu'il ne parvenait pas à articuler un seul mot. Heureusement le rituel était terminé et il suivit les vestales jusqu'à une chambre où il s'emmitoufla dans les couvertures qu'il récupéra sur les deux lits.

La vestale qui l'accompagnait eut pitié de lui et lui proposa un thé chaud qu'il accepta en opinant du chef.

Quand elle revint avec une tasse fumante sur un petit plateau, elle était accompagnée par le vampire Quigg Certi. Arawn pris le récipient dans ses mains tremblantes, sentant la brûlure du thé l'effleurer à peine quand il passa sur sa langue alors qu'il l'avalait presque cul-sec. Il pesta entre ses dents. Pour une fois qu'il pouvait revenir gratis au Pays de l'Eté, il aurait bien aimé en profiter pour voir sa mère plutôt que de se retrouver collé au lit avec une hypothermie.

(945)

Cordélia se moquait pas mal des explications de Tamia, elle avait été très douée à l'école et connaissait déjà tout ça. Quartz étant originaire du Pays de l'été, elle s'était pas mal renseignée quand elle était entrée à l'Agence en tant que scientifique – à l'âge de douze ans -. Il faut dire que son univers entier avait tourné autour de l'Inya. Aujourd'hui c'était un peu différent. Elle avait mûri, vieilli… Dix ans plus tard, elle avait appris sa leçon, elle avait nécessairement besoin d'une mission pour survivre, mais ce n'était pas le seul terreau qu'il lui fallait. Même en étant habituée à cette idée, elle continuait régulièrement à s'accrocher à son travail, à Quartz, et à toutes ses habitudes. Puis, elle avait mauvaise réputation de toute manière, même si elle avait un peu modifié son comportement ces deux dernières années – depuis que Chris' était papa -, on continuait de l'appeler Poison Cordy. Ce qui n'était pas si grave car elle se sentait encore capable d'empoisonner n'importe qui la contrariant un tant soit peu.

Comme Raëlle avait rejoint Johan, elle se retrouva, sans trop savoir comment, avec l'agent Rhian d'un côté et Ian de l'autre. Elle prit leur main et les tint serrées pendant le rituel tant elle craignait que tout ce pouvoir ne la fisse tomber. Elle était plutôt puissante (parmi leur groupe, elle faisait partie des plus gradés) mais elle restait à moitié humaine, tant de pouvoir d'un coup c'était dur à supporter pour son corps. Comme beaucoup, elle se sentit mal lorsque le rituel se termina et, à sa grande surprise, ce fut Miaka qu'elle retrouva près d'elle pour l'aider à se relever. Mais la prêtresse ne lui adressa pas un mot. Cordy en déduisit qu'être l'amie de Raëlle devait la rendre antipathique aux yeux de la plus sympa des triplettes, mais pas au point de la laisser écroulée par terre. Cordy lui en fut surtout reconnaissante parce qu'elle n'avait pas envie que ce soit Ian qui l'attrape, lui qui était un ange immortel qui n'avait pas les faiblesses de Cordélia. En plus, au vu de leur dernière entrevue, tout contact physique supplémentaire était, de préférence, à proscrire. Elle l'avait presque embrassé tout de même ! (Presque seulement) Et maintenant, elle tâchait, de nouveau, de l'éviter… mais moins qu'avant, car sinon, il le prendrait encore mal. Là, c'était seulement qu'elle se sentait vraiment très fatiguée et peu ouverte à la conversation.

Miaka la confia à une vestale qui la soigna (si l'on peut dire, elle n'était pas vraiment malade après tout) et quand elle rejoignit sa chambre, elle vit celle avec qui elle la partageait qui en sortait, Elysa Montgomery, la belle-sœur par alliance de Christopher. Cordy la connaissait mais assez mal parce qu'elle n'était pas sociable et, finalement, en dehors de Raëlle, Ian, Lillian et Christopher, elle ne discutait pas avec grand monde, sauf si on comptait ses prises de bec avec Katarina comme des conversations.

« Elysa ! » Appela-t-elle avant que la brunette ne disparaisse au détour d'un couloir. Arrivée à sa hauteur, la scientifique s'appuya sur le mur. « Tu sais où est notre chambre ? J'étais avec une vestale pour me remettre d'aplomb mais elle m'a laissé seule et ce temple est vraiment trop grand. » En plus de ne pas être intéressant, encore que si elle pouvait aller au jardin avant leur départ, elle pourrait peut-être ramener quelques spécimens rares pour ses décoctions… « Tu ne dois pas être ravie d'être séparée de Daël. » Finit-elle par ajouter car c'était quand même vraiment idiot dans la mesure où les couples mariés n'avaient pas pour habitude d'être séparés. Mais c'était un ordre de Quartz… sûrement pour embêter son monde !

{617}

Si Alleya avait pour but d'éloigner tout soupçons de la part d'Archi, sa mission avait été un franc succès. Non content d'avoir répondu aux interrogations du jeune homme, elle en avait créé de nouvelles chez lui. Quand le jeune métis (donc, parce qu'il fallait se rendre à l'évidence, Archibald n'était plus un simple humain selon Tamia, il avait dans le sang tout un tas d'origines différentes un vrai bâtard donc) entendit la jeune fille lui parler de l'école à laquelle elle était ici, au pays de l'été donc, il ne put s'empêcher de se sentir frustré.

« L'école n'est que pour les enfants ? Parce que j'ai appris que j'étais un quart voleur d'âme moi aussi et donc à l'école j'aurai du y aller moi aussi. C'est pas juste !»

Eux, ils avaient appris plein de trucs (sans parler de la vie dans cette dimension), depuis qu'ils étaient petits. Lui il arrivait comme un cheveu sur la soupe et il avait des millénaires d'histoire à apprendre, comprendre et retenir en seulement quelques mois ! Vous voyez la cohérence non ? On aurait du lui proposer à lui aussi des petits cours, même en accéléré.

« Tu ne sais pas s'ils font des cours de rattrapage ? En plus le cadre est assez sympa ici... »

Comynerin était sympa aussi, mais dans un tout autre style. C'était une capitale, ça grouillait de monde, Archi lui préférait cent fois la nature et les ambiances pesantes posées, comme ici. Et puis comme le disait Alleya, c'était une société matriarcale, gérée donc par des femmes, ça se voulait donc plus apaisé que le reste du monde. Tout en hochant la tête pour rassurer Alleya, Archi disparut avec les autres hommes, dans le but de trempouiller un peu (et dire qu'ils étaient payés pour faire ça).


Bien évidemment, la première personne a qui Archibald parla, se révéla être un vampire. Il croyait tomber sur l'humain lambda, avec 30 années maxi au compteur ? Et bien non ! Lui, il faisait dans la race de luxe, celle qu'on ne voit jamais et qu'on ne connaissait forcément pas. Maintenant, après plusieurs semaines sur Emeraudia il connaissait les anges et les démons mais voilà que maintenant on lui imposait de connaître toutes les autres races moins connues.

« Je sais pas si me battre était mon point fort à ma première mission, mais maintenant que je gère un minimum, j'aurai préféré ça pour la seconde. Me faire enlever des pouvoirs que je connais à peine m'embête un peu, je l'avoue. Tu es un vampire ? Comme ceux qui boivent du sang et qui se transforment en chauve-souris, ou bien je dois revoir mes classiques ? »

Archi rigola un peu à sa fausse question. Il avait volontairement archétypé le mot 'vampire' bien qu'il soit totalement convaincu que – comme les démons qui n'avaient pas de cornes – les vampires d'Emeraudia ne tuaient pas des humains pour se nourrir, n'avaient pas le teint blaffart, un reflet inexistant et une allergie à l'ail et n'étaient pas non plus thérianthrope. On pouvait toutefois avoir des surprises, c'était vrai et ça serait fort surprenant !.

Nous noterons qu'Archi était bien à l'aise quand il parlait, normal : il parlait peu en général, alors maintenant que quelqu'un lui avait gentiment répondu, il n'allait pas le lâcher.


« Archibald Grant. Mais tu peux m'apeller Archi Toi je peux t'apeller Yv' ?.»

Quand Yvain lui confia ses doutes sur le rituel, la langue d'Archibald se délia toute seule, comme s'il venait de trouver LA personne qui pensait comme lui et à qui il pouvait tout dire.

« Oui, pareil, je pense que si on avait voulu désobéir on ne serait carrément pas venu, c'était plus simple. Et puis je mesure quand même l'enjeu de ce rituel, ce n'est pas anodin et je pense qu'il est vital. »

La note sur Tamia fit sourire Archibald, il la connaissait un petit peu à présent, et il était également convaincu qu'elle ne le kiffait pas grave en tant qu'agent. Mais l'un dans l'autre, ça ne le vexait pas, il la savait également assez dure et très peu transparente, donc...

« Je crois que généralement Tamia n'aime pas grand monde. Enfin sinon elle le cache bien. Mais si ça peut te rassurer, je ne suis pas non plus son agent préféré ! »

Archi sourit et se convainc mentalement que Tamia devait l'aimer un petit plus qu'il le pensait. A sa manière, elle agissait comme une mère avec ses agents, même s'il était clair que ses petits démons étaient de loin ses préférés.

La baignade terminée, les deux agents sortirent du bain et s'habillèrent pour la cérémonie. Archi était tout en blanc, un pantalon en tissus et une chemise un peu ample. Il était à l'aise, c'était le principal. Et après quelques minutes de marche à la suite des trois prétresses, ils étaient arrivés à la salle du rituel.

L'agent écouta très attentivement le spitch de Tamia, touché par l'émotion que celle-ci dégageait durant son discours. Vint assez rapidement le moment du rituel en lui même. Archi était entouré par Yvain son nouveau meilleur ami et une femme qu'il avait déjà vu quelques fois (Aziliz) sans la connaitre pour autant.

Une lumière sortit d'abord de lui et il sentit toute sa force le quitter, c'était TRES désagréable. L'humain préféra donc fermer les yeux (comme il le faisait dans un manège à sensations fortes). C'était plus sage, il voulait surtout rester concient et ne pas s'évanouir comme une fillette. Bien loin de lâcher les mains de ses voisins, il fut totalement soulagé quand le rituel pris fin (fort heureusement il n'était pas très long). Archi était erreinté. Encore debout, l'agent préféra s'asseoir, les bras sur ses genoux, pour éviter de faire un malaise ou tout autre chose qui l'aurait fait remarquer. Quand il fut un peu dans son état normal, il tourna la tête vers sa voisine de droite (Aziliz donc) et lui lança :

« On a encore nos pouvoirs là ? Où ils reviendront plus tard ? »

Très franchement, Archi ne se sentit même pas la force d'essayer une seule fois son hypervitesse. Il n'avait pas assez de force pour ça. C'est contre toute attente qu'il se leva pour aller dans ses quartiers, en disant au revoir à la jeune femme. Une bonne sieste lui ferait du bien. Tout du moins, il l'espérait. En tout cas il ne se sentait de faire rien d'autre (un autre petit bain, peut être ?).

L'agent se rendit dans sa chambre où il n'était hélas pas avec Yvain (on l'avait placé avec quelqu'un d'autre. Merci le pays de l'été ! Briseur d'amitié.). En fait il était seul quand il entra, bien qu'il y ait deux lits. Peu lui importait avec qui il était : il voulait dormir. Il se chargerait après de faire la discussion à son futur voisin de chambre s'il en avait un. Pour l'heure, Archi jugea que se faire enlever ses nouveaux pouvoirs dans un pays qu'il ne connaissait pas, après avoir pris un bain nu avec des inconnus, méritait bien un petit moment rien qu'à lui où il pourrait recharger les batteries. Et l'oreiller avec l'air d'un petit nuage, en plus, alors comment résister ?

(1208)

[Tous les mecs étant déjà avec quelqu'un dans les chambres, celui qui veut peut rejoindre Archi sans problème dans la sienne ! ]

Toute cette histoire de rituel dépassait un peu Sithmaith. Il faut dire qu'elle venait d'arriver sur Emeraudia et elle ne connaissait que le peu qu'on lui avait expliqué à son arrivée ainsi que ce qu'elle avait pu lire dans des livres. Pas forcément assez pour comprendre les enjeux d'un tel rituel. Ce qu'elle nota d'important était qu'elle n'allait pas perdre son pouvoir et qu'elle serait juste fatiguée après. Ça, ce n'était vraiment pas très grave, car elle était un ancien cobaye qui avait servi à des expériences d'aussi loin qu'elle puisse s'en souvenir… alors être juste fatiguée… ça ne lui paraissait pas grave du tout, surtout si l'enjeu était important. Et vu les mines graves de tous ceux qui l'entouraient, elle ne doutait pas un seul instant que ce fut le cas. Obsilone s'était faite discrète, fleur dans ses cheveux. Normalement, sa couleur aurait du faire qu'elle s'en aille… si elle avait été un véritable accessoire mais ce n'était pas le cas, les prêtresses le savaient. Et les pouvoirs des fées étaient exactement ce pourquoi Sithmaith était là. « Même s'ils avaient voulu que je m'en aille, je ne l'aurais pas fait, hors de question de t'abandonner. » souffla Obsilone comme en réponse à ses pensées. C'était bon de l'avoir toujours avec elle, au moins dans toutes ces nouveautés, elle n'était pas trop perdue.

Et effectivement, après le rituel, Sithmaith se sentit faible. Elle avait la tête qui tournait. Une Vestale l'aida à rester debout dans un premier temps puis à s'asseoir à l'extérieur de la salle. Visiblement ils avaient accompli ce que Tamia attendait, c'était sûrement l'essentiel. Elle n'avait rien compris à l'après – déjà que l'avant n'était pas clair -, mais elle décida sagement qu'il fallait régler une chose à la fois et qu'elle demanderait des explications plus claires après, quand elle se sentirait mieux.

La même Vestale, décidément bien gentille, la conduisit jusqu'à sa chambre. Sithmaith marchait lentement, elle avait du mal à avancer car ses pouvoirs étaient profondément ancrées en elle… mais même s'ils avaient été pris, elle les sentait encore en elle, comme s'ils dormaient seulement… et elle avait l'intuition qu'ils se réveilleraient en même temps qu'elle si elle faisait un petit somme.

La chambre dans laquelle elle se retrouva était déjà occupée par une jeune femme (Hell), remerciant à mi-voix la Vestale, elle se traîna jusqu'au second lit et s'allongea. Obsilone reprit sa forme normale et se roula en boule à côté d'elle. Une fois assurée que tout était en ordre, elle s'endormit en un clin d'oeil. Lorsqu'elle se réveilla quelques heures plus tard, la Vestale frappait à leur porte. Sithmaith fut la première à se réveiller et alla donc ouvrir. C'était leur repas qu'on leur apportait sur des plateaux. L'ensemble était principalement composé de fruits et de pain, ça tombait bien vu que Sith' mangeait très peu de viande… mais les Vestales le savaient peut-être justement.

« Mademoiselle heu… vous voulez manger ? » Demanda Sithmaith une fois les plateaux récupérés tandis que sa compagne de chambre s'éveillait doucement. Elle ne voulait pas s'imposer, mais pour sa part, elle avait faim. Elle commença à grignoter et Obsilone la rejoignit. Par politesse, Sithmaith sourit timidement avant d'ajouter : « Je suis nouvelle, je m'appelle Sithmaith, et voici Obsilone, c'est une fée. » Simple précision au cas où les ailes n'auraient pas parlées d'elle-même.

{558}

« Oui, uniquement pour les enfants, et un quart de sang ne suffit pas pour y entrer. Quoique, Johan y était et il est humain… mais bon, tu as largement passé l'âge ! » Sourit Alleya en parlant à Archibald, bien avant qu'ils ne soient vraiment embrigadés dans le rituel et tout le tintouin. « Je te donnerai des cours de rattrapage, ne t'inquiète pas, je suis sûrement la plus douée en démonologie des métis de Comynerin... » Forcément, quand votre mère est la reine des démons, ça aide. Quant au cadre, ça dépendait. Même si les hommes n'étaient pas maltraités, le Pays de l'été était quand même victime d'un sexisme ambiant. Mais d'après Alleya, ça avait au moins le mérite de faire contraste avec le pays des anges parce que si Lantys n'était pas un mauvais bougre, certains de ses généraux étaient des machos qu'elle aurait bien envoyé valsé elle-même si elle avait été plus forte (mais sa mère s'en chargeait pour elle, merci maman!).

Plus tard, elle mit de l'ambiance dans le bain des filles. Ce ne fut pas apprécié à l'unanimité, elle le remarqua, mais elle s'en fichait. Tous ne le savaient pas, certes, néanmoins elle était chez elle ici, elle faisait ce qui lui plaisait ! Dans la mesure du raisonnable tout du moins car elle redevint vite sérieuse lorsque sa mère parla dans la salle du rituel. Elle y avait déjà été quelques fois pour des cérémonies, et elle connaissait les histoires de son pays. Elle était une des descendantes de la première reine. Pas aussi puissante, pas aussi charismatique peut-être non plus, néanmoins, elle savait qu'elle avait de quoi être fière de cet héritage… et des anges avaient osé en volé une trace concrète. Elle sentit une bouffée de colère l'envahir… il lui fallut tout son self control pour se reprendre.

Elle tint néanmoins les mains de ses voisins et resta bien sage pendant toute la durée du rituel. Elle en souffrit moins que d'autre et elle se demanda si sa mère ne l'avait pas épargné volontairement… dans le doute, elle se fit discrète. Elle attendit que tout le monde reprenne ses esprits et s'avance vers les Vestales pour avoir une chambre, puis, elle alla demander la sienne. On l'avait mise avec Lilith, une démone. Ça tombait bien, elle n'avait rien contre les anges de manière générale mais en ce moment précis elle n'avait pas envie de dormir dans la même pièce que l'en d'entre eux.

Comme elle n'était pas très fatiguée, elle ne voyait juste plus les auras des gens autour d'elle, elle longea les couloirs, guettant la présence de ses collègues, et elle se rendit jusqu'aux appartements royaux. Elle avait à peine franchi le seuil que la voix de sa tante la fit sursauter : « Eh bien Ella, tu joues aux voleuses ? » Alleya porta la main à son coeur qui se calmait petit à petit après une courte frayeur et sourit à sa tante Miaka. C'était bizarre mais en fait ça ne la surprenait même pas qu'elle soit ici. Elle devait sûrement attendre quelque chose… ou plutôt quelqu'un. Elle voulait sûrement voir Tamia pour en savoir plus sur Raëlle et Johan.

« Tante Miaka ! Tu m'as fait peur ! Je ne vois pas les auras en ce moment tu sais ! Maman est là ? » Miaka fit non de la tête, bon… elle ne devait pas encore être rentrée de l'après rituel. A moins qu'elle ne flirte avec Lantys mais ce serait étonnant. Pas après ce qu'elle avait entendu la dernière fois quand elle était enfermée dans le placard avec Arawn. « Et toi… tu as vu Johan ? » ce fut au tour d'Alleya de répondre par la négative : « Mais il passera sûrement te voir, enfin, du moins, il ira voir Junior. Tu ne penses pas que tu devrais passer à autre chose ? Vous êtes pénibles maman et toi avec vos fixettes là... » Miaka n'eut pas le temps de répondre, une Vestale lui demanda de venir pour régler un problème qui était de son ressort. Elle embrassa sa nièce d'un air mélancolique et s'en alla, laissa Alleya seule dans la chambre de sa mère. Elle sauta sur le lit, comme quand elle était enfant, et elle se mit sur le dos pour regarder le plafond.

Elle finit par s'endormir, peut-être que le rituel l'avait plus fatigué qu'elle ne le croyait… Tamia la trouva dans la pièce quelque temps plus tard. Elle monta sur le lit à côté de sa fille et lui remit une mèche de cheveux en place car elle cachait son visage. « Mon pauvre bébé… » Murmura Tamia en ramenant une couverture sur sa fille et en se couchant près d'elle. Elles auraient tout le temps de parler une autre fois, et pour être honnête, même une reine des démons a besoin de dormir parfois !

{817}

« On paraît tous un peu inutiles quand elles sont toutes là. » Avait répondu Johan à Daniel en désignant les prêtresses des démons. Il ne voyait pas bien ce qu'ils allaient pouvoir faire pour des femmes qui étaient nettement plus puissantes qu'eux. Il en savait quelque chose, alors qu'il n'avait que 19 ans, il avait été charmé (au sens littéral) par Miaka. Une illusion d'amour qui avait donné naissance à leur fils mais dont Johan avait eu du mal à se remettre. Si la puissance pouvait faire peur, pour un Voleur d'Âme, les prêtresses, surtout celles de la famille royale, étaient plutôt attirantes… mais pas dans le bon sens du terme, elles étaient plutôt comme des sirènes qui envoûtaient mais n'amenaient pas forcément quelque chose de bon au bout de l'aventure. Pour sa part, il avait fui et c'était pour ça qu'il vivait sur Comynerin alors que son père était toujours ambassadeur en résidence permanente au Pays de l'été.

Il chercha d'ailleurs du regard sa fiancée qui devait être à peu près aussi à l'aise que lui, mais il y avait beaucoup de monde sur le parvis, autant chercher une aiguille dans une meule de foin… L'étape des ablutions se passe elle aussi sans heurt de son côté, il faut dire que s'il n'avait pas craint que ça le fasse remarquer, il aurait rasé les murs simplement pour éviter Miaka. Il ne lui avait pas encore dit qu'il avait demandé Raëlle en mariage : même si ce ne serait pas une énorme surprise pour son ex, elle n'allait sûrement pas être ravie. Et c'était toujours dangereux pour un simple humain comme lui (même pourvu de pouvoirs démoniaques) de contrarier une princesse démone. Non pas que Miaka soit du genre caractérielle, vu la manière dont il l'avait quitté, on pouvait même se dire qu'elle était assez zen.

Quant à porter du blanc, ce n'était pas vraiment quelque chose qui lui allait très bien, surtout en intégral, mais comme pour le reste, il évita de faire toute remarque et se contenta de suivre le mouvement. Il s'était aussi tenu assez loin des conversations de certains de ses camarades qui parlaient de prêtresses qu'ils auraient éventuellement préférés déshabillées… Merci, mais non merci. Cela dit, ça devait être plus facile d'être irrévérencieux quand, comme Itachi, on ne venait même pas d'Emeraudia. Si Johan était le pur produit d'une société matriarcale, Itachi devait être celui de la société patriarcale des démons terriens, tout Satan excepté car elles étaient assez effrayantes dans leur genre elles aussi.

Le rituel ne se passa pas très mal et, clairement, Johan eut l'impression d'être là surtout parce que toute son unité avait été conviée. Son pouvoir était le même que la reine après tout, encore que son côté humain lui ait donné une forme qui pouvait être plus inédite à certains égards. Dans tous les cas, il se sentit faible mais capable de trouver sa chambre seul.

Il la partageait avec Archibald, un nouveau. Il était déjà dans la chambre et il semblait roupiller comme un bienheureux. Johan aurait voulu l'imiter mais il avait besoin de Kerona. Il allait prendre son téléphone pour demander à ses parents de lui en apporter ici – c'était mieux que de demander aux Vestales et ça ferait une occasion de les voir – mais quelques coups furent frappés à la porte. Archibald ne semblant pas réagir, Johan se leva et il fit bien car la visite était pour lui : c'était son fils… avec du kerona à la main. Brave garçon !

« Eh… salut bonhomme ! Entre. Je suis content de te voir. » Il ne parlait pas trop fort pour ne pas réveiller son compagnon de chambrée. « Moi aussi papa je suis content, tante Tamia m'a dit que tu aurais besoin de Kerona et que tu te trouvais ici. » Au moins la reine n'était-elle pas toujours en mode sadique…. « Merci. Tu permets que je me fasse l'injection avant qu'on discute tous les deux ? » Son fils opina du chef – comme son père, ce n'était pas un grand bavard – et Johan lui prit la seringue pour se mettre le produit dans les veines. Cela ne prit pas longtemps, il avait tellement l'habitude… surtout quand il se trouvait ici, au milieu des vrais Voleurs d'Âmes.

Ensuite, il s'installa dans le lit, s'adossant aux coussins. Son fils se mit avec lui et là, à mi-voix, ils discutèrent. Johan en profita pour lui annoncer ses fiançailles avec Raëlle ce qui ne provoqua aucune réaction excessive chez Junior. Il était habitué à Raëlle depuis le temps et il s'entendait très bien avec elle. En plus, il n'avait jamais connu ses parents ensemble donc il ne vivait pas dans l'espoir que ce soit un jour de nouveau le cas. En fait, il trouvait même que c'était une bonne nouvelle mais il restait discret quant à ses sentiments par égard pour sa mère, Miaka.

Finalement, Johan senior s'endormit, et Junior resta avec lui, prenant dans sa petite sacoche son jeu vidéo. Il aurait bien été voir Raëlle, mais les garçons n'avaient pas le droit d'aller dans les chambres des filles, même pas les petits garçons comme lui, c'était ce que sa tante avait dit et sa tante avait toujours raison, non ? Quelle innocence!

{878}