La description de la succube fut claire et... surprenante. La petite précision de fin de Cordélia fut un vrai plaisir : les succubes ne tuaient pas sur Emeraudia. On se serrait presque cru dans une utopie dangereuse où personne ne pouvait être vraiment lui même sous peine de froisser les hautes instances et aussitôt mourir. Refouler la nature profonde des gens n'était certainement pas une bonne idée, elle revenait généralement deux fois plus forte après. Mais bon, si le système marchait comme ça, alors c'était tant mieux (de toute manière faire confiance à un criminel potentiel était certainement plus humain que mettre fin à ses jours).
« Charmant. » Le pauvre et stupide petit Archibald était bien loin d'avoir découvert toutes les petits joies relatives à cette dimension. Les succubes, il s'en doutait, ce n'était pas les créatures les plus dégoûtantes et dangereuses qu'il croiserait. Il n'avait pas spécialement envie de rejoindre l'agence pour combattre des criminels ou bestioles répugnantes et violentes, mais s'il voulait faire ça, c'était pour porter secours aux civils et aux innocents qui y étaient confrontés.
La jeune scientifique lui expliqua ensuite pourquoi Archi était métis et non humain. Allez savoir comment, elle avait deviné que son père n'était pas un humain de la Terre. Sur ce point là au moins Archibald était fixé : son père n'était pas un humain. Il ne savait pas ce qu'il était, pas où il était, pas
qui il était, mais il lui devait au moins la mixité de ses gènes. C'est toujours ça de pris.
« C'est rassurant de savoir qu'on n'est pas un monstre de foire, alors... » Petit plaisanterie sur le fait que les métis n'étaient certainement pas la pire chose qu'on pouvait voir ici. Après les succubes, les anges et les démons, allez vous imaginer ce qui pourrait encore exister (les Vampires et les loup-garous devaient bien exister dans une dimension, alors...).
Après avoir chaleureusement remercié la scientifique, celle-ci lui conseilla de se ménager. Elle était docteur, il allait donc l'écouter (de toute façon il était assez grand pour comprendre que ce genre de malaise n'était plus acceptable quand il était au travail. Il s'était peut être un peu surestimé). En revanche, il n'apprécia pas trop le fait qu'elle laisse entendre qu'être un humain signifiait être extrêmement fragile. Elle était peut être habituée à avoir des patients vieux de plusieurs centaines d'années et résistants au balles, mais ça n'empêchait pas qu'Archi, lui, n'était pas un garçonnet de 12 ans.
« C'est peut être difficile à croire, mais je ne suis pas le genre de garçon fragile, en règle générale. » Bien que la jeune femme ait toutes les raisons du ciel d'exploser de rire à pleine bouche après l'incident qui venait de se passer, Archi était plus vexé qu'effrayé par la réaction de la belle. Il n'avait beau être 'qu'un' humain, simple et mortel, sans pouvoirs, sans avoir la capacité de lancer des flammes par les yeux ou de cracher de l'eau par les narines, mais il n'était pas
faible. La fragilité ça ne l'avait jamais caractérisé, il connaissait ses limites (bon disons qu'il les connaissait mais les avait frôlées de près, surtout en ce moment) et elles étaient plus éloignées que la plupart des gens de son âge et de sa race. Alors oui il n'avait pas 1350 ans et à 90 ans il serait très certainement à l'hospice, mais il n'était pas pour autant en polystyrène, en sucre, ouen mousse.
« Je dois vous faire signer la décharge. » Répondit-il plutôt vivement alors que Ralph entrait dans la pièce. Archi lui fit un signe de tête lui signifiant que ça allait et l'homme s’avança pour donner à Archi ce qu'il avait acheté (un gâteau au chocolat et un soda) et rendre le porte-monnaie à la scientifique. La jeune femme s’exécuta plutôt rapidement et Archi acquiesça d'un signe de tête, les lèvres closes, et le rangea sous son bras. Il vérifia que la machine était bien installée et alors qu'il allait suivre Ralph (qui semblait bizarrement ne pas trop savoir où il habitait. Manifestement se faire diriger à la baguette n'était pas son dada, on aurait dit que Cordélia lui faisait peur), il se tourna vers la jeune femme, qui semblait s'être complètement désintéressée de lui.
« Je vous souhaite une bonne journée. Et si vous avez un soucis avec la machine, le numéro à appeler est sur le double que je vous ai laissé. » Il ne mentionna pas son malaise (c'était déjà suffisamment humiliant), ne la remercia pas une cinquantième fois et une fois qu'elle l'eut salué, ils tournèrent tous deux les talons et regagnèrent l'extérieur de la tour. Une fois sortis du laboratoire, Archibald se sentit un peu soulagé. Pas que la jeune scientifique l'ait une seule fois jugé, bien au contraire, mais il n'avait besoin de personne pour péter la honte, merci bien. De plus le pouvoir de la jeune femme l'incommodait vraiment et il n'espérait plus jamais y avoir affaire. Pour l'heure, il se devait d'oublier cette petite mésaventure et se remettre sans tarder au travail avec Ralph, ils avaient assez perdu de temps à cause de lui. Ce fut sans parole : Archi avala sans attendre ce qu'avait acheté Ralph et ce dernier reprit le volant sans dire un mot. Il n'en attendait pas moins de son précieux collègue.
- Terminé pour Archibald -